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samedi 18 février 2017

1572-1573, bataille navale entre laotien et khmers à proximité de Chhlong ? Une histoire d'éléphant qui tourne mal..




En 1572-1573,  bataille navale entre laotien et khmers à proximité de Chhlong ? :

Voulant agrandir son royaume vers le Cambodge, Le roi du Laos défiait en 1573, le
roi Khmer par un combat d’éléphant dont l’enjeu était leur royaume respectif.

L’éléphant du roi Khmer sort vainqueur de ce duel.
Le roi exige la reconnaissance de sa suzeraineté sur le Laos ce que refuse son roi.

Sachant le royaume Khmer en guerre avec le SIAM, le roi du Laos décide d’attaquer. Sa flotte descendra le fleuve Mékong pour affronter la flotte Khmer aux environs de Chhlong (Prek Prasab) où elle sera défaite tandis que le roi du Laos sera vaincu à la tête de son armée dans la province de Kompong svay (à proximité de la colline d'Asanduk).

Voici le détail de cette guerre qui n'est relatée que dans les Chroniques royales Cambodgienne (traduite par M. Khin Sok) et n’a pas été retrouvée dans les annales du Laos.

En 1568 (930 de l’ère Culla, 1490 çaka) Paramaraja, âgé de 51 ans, monte sur le trône. Il résida dans la capitale Lovek. Son fils ainé Brah Sattha était âgé de 26 ans, son fils Brah Sri Suriyobarna était âgé de 24 ans.

En 1569, l’année suivant celle de son sacre, il décide d’attaquer le Siam pour reprendre les provinces annexées par celui-ci au temps de son père. Il attaque le SIAM par la voie maritime où ses généraux prendront les provinces de Candapura, Rayan, Sak Sieh Sau, Narioen. Par voie terrestre il soumit les provinces de Pascina et de Nan Van et continua sur Aydhya dont il fit le siège avant de se replier à cause des fièvres lié à la saison des pluies. La guerre reprend l’année suivante (1570) par la prise de la province de Nagara Rajasema. Le roi résidait alors à Kamban Krasamn près de Nagara Vatta (Angkor Thom) où ses chefs d’armée le rejoignirent. Son fils Brah Sattha résidait à Lovek pour veiller sur le palais royal.C’est alors en l’année du singe, 1572 de l’ère chrétienne, le roi du Laos Sri Sattana Gunhut soucieux d’agrandir son royaume souhaite attaquer le Cambodge et le soumettre mais les prétextes manquent.

Un de ses ministres lui propose alors : « Nous possédons un éléphant de guerre très puissant appelé Phlay Sin Tu ; nous proposerons un combat d’éléphants avec l’auguste pays pour enjeu. Si nous sommes vainqueurs, le Kambuja doit être soumis. Si nous sommes vaincus, le peuple de Kambuja n’osera pas nous attaquer car il laisserait son pays sans garde face au Siam. »

Le roi du Laos approuva et chargea deux ministres accompagné de mille soldats de conduire l’éléphant au roi Khmer avec 4 paires de défenses d’éléphant, 2 cornes de rhinocéros, un plateau à pied en or, un bassin d’or et dix queues de yak.

Ils descendirent par la route de Sdih Traen et arrivèrent à la limite de la province de Tpun Ghum puis à la rive occidentale. Alors le gouverneur de la province de Sampurna qu’il venait de traverser arrêta l’éléphant et les soldats et fit un rapport au gouverneur de la province de Tpun Ghmum.

 Des messagers conduisirent les deux ministres laotiens et dix soldats auprès de Brah Sattha à Lovek. Le roi avertit, retourna à Lovek où il reçut les deux ambassadeurs. Il prit connaissance du défi lancé par le roi du Laos. 
Le roi du Kambuja, pris par la guerre contre le Siam accepta le défi. Il envoya les ambassadeurs, les dix soldats et l’éléphant  sur la colline d’Asanduk.

Durant les jours suivants, on choisit un éléphant nommé Gujja Vai Han Kla et entrainèrent l’animal. 

Le roi du Kambuja rejoignit la colline d’Asanduk et fixa le lieu du combat. 

Le combat commença.  

L’éléphant du Kambuja dont les défenses étaient les plus longues perça l’éléphant laotien juste sous la protection de ses défenses. 

L’éléphant laotien se retira vers l’Est, il le poursuivit et donna encore deux coups dans la croupe de son adversaire qui barrit très fort. 

L’éléphant laotien vaincu, le roi du Kambuja demanda aux ministres laotiens ce qu’ils en étaient de la promesse de leur roi. Les ambassadeurs lui demandèrent la permission de se retirer pour rendre compte au roi du Laos.
 
Le roi du Kambuja accepta et leur demanda de lui apporter le message et le tribut de vassalité comme promis. 

Le reste des soldats laotiens furent confié au gouverneur de la province d’Asanduk tandis que le roi allant dans la province de Kampong Svay ordonna au gouverneur d’y construire une citadelle et de veiller sur la province. 

Il descendit sur la berge pour s’embarquer et appela cet endroit Kamban Dham et revint dans son palais. 

Ensuite le roi demanda aux gouverneurs des provinces des rives orientales et occidentales de construire des citadelles, de réquisitionner la population, de nommer des chefs, d’entrainer les soldats pour se tenir prêt à combattre l’armée siamoise ou l’armée laotienne.

Les deux ministres laotiens et les dix soldats conduisirent l’éléphant et arrivèrent à la ville de Malan Prades. Ils rendirent compte au roi Sri Sattana Gunhut. 

Le roi dit alors :
« Nous n’acceptons pas de nous soumettre au roi Khmer, car nous sommes un auguste et grand roi indépendant. En plus, nos soldats sont  nombreux. Pourquoi craindre les soldats khmers ? Maintenant le moment est propice. Les Khmers sont occupés avec le Siam. Si nous levons une armée pour les combattre, il est sûr que nous les soumettrons facilement. »



Puis le roi ordonna de rassembler tous les soldats, les vivres, les éléphants et les chevaux.

 
En l’année du Coq (1573 AD.), le roi du Laos chargea Bana Uppahattha (ou Maha Uparaja ) de conduire une armée de 50000 hommes par le grand fleuve (le Mékong) et de suivre la route de la province de Sampurna.
 
Le roi du Laos, en personne, conduisit une armée de 70000 hommes (ou 100000 hommes) par voie terrestre, avec 500 éléphants de guerre et 1200 chevaux. Il nomma Bana Surivansa, chef de l’avant-garde, Surinda Ghvan Eva, chef de l’aile droite, Bana Mihi, chef de l’aile gauche et Bana Mioen Lik, chef de l’arrière garde. Il descendit vers la province de Bram Deba.

Alors, un serviteur du gouverneur de Bram Deba fut chargé d’aller prendre les renseignements au Laos. Les ayant obtenus, il envoya une lettre au gouverneur. Celui-ci chargea un serviteur d’apporter la lettre aux généraux afin de les informer. 
 
Ces derniers rapportèrent la chose à Sa Majesté.

Sa Majesté dit :
« Le roi du Laos a envoyé son armée par deux chemins. C’est une outrecuidance ! Il n’a aucune des vertus royales ! S’il n’accepte pas de se soumettre, au moins qu’il se tienne tranquille. Mais non, maintenant, il lève encore son armée contre nous ; il sera surement vaincu.»


Le roi nomma Brah Satta, son fils ainé, chef de l’armée chargé de rassembler la population des rives orientale et méridionale, depuis la province de Brah Trabamn. Il en rassembla 30000, puis mena son armée par voie fluviale pour livrer bataille à l’Uparaja laotien.

Sa Majesté chargea Brah Sri Suriyobarna, son fils cadet, de recruter la population des provinces de Bodhisat et de Pat Tampan ; il parvint à rassembler 20000 soldats, 150 éléphants, 500 chevaux, 100 buffles, il conduisit l’armée en suivant la route de Nagara Vatta. Il passa dans la province de Kamban Svay pour se tenir prêt à attaquer par derrière.


Il chargea Bana Udaidhiraja, gouverneur de la province d’Asanduk de rassembler la population des provinces du Nord. 



Bana Arjun de rassembler la population des provinces de l’Est et d’aller livrer bataille dans la province de Sampuk.

Quant au roi en personne, il donna l’ordre de rassembler toute la population de la rive occidentale ; il avait recruté 500 éléphants, 2000 chevaux et 50000 soldats. Il conduisit ses quatre armées et continua sa route vers la colline d’Asanduk. Il donna l’ordre d’y construire une solide citadelle.

Le Cau Baha Udaidhiraja, ayant trouvé que l’armée laotienne était trop nombreuse, abandonna le combat et ramena toutes les failles dans la citadelle d’Asanduk. 


Bana Arjun replia son armée et se tint prêt à combattre dans la province de Tpun Khmum





L’armée du roi du Laos arriva dans la province d’Asanduk. Cau Bana Udaidhiraja se hâta de faire monter ses soldats sur la citadelle et de se tenir prêt au combat. Le roi du Laos, sur son éléphant, excita aussi ses soldats à livrer bataille. Les soldats réussirent à prendre la citadelle. Les soldats khmers furent vaincus et se dispersèrent. Cau Bana Udaidhiraja s’enfuit de la citadelle et rencontra l’armée du roi. Il rendit compte à S.M. de tout. Le roi pardonna à Cau Bana Udaidhiraja car l’armée laotienne était conduite par le roi.

 
L’Uparaja laotien qui avait conduit une armée par voie fluviale, ne voyant pas d’armée khmère qui remontât pour lui livrer bataille. Il fut pris de doute.

La population riveraine fuit toute entière dans la forêt. 

L'Uparaja laotien conduisit son armée à la hâte jusqu’à la province de Sri Sajhar.

Il ordonna de mouiller les barques de guerre dans un braek à l’abri des vents et des flots. 

Alors, Brah Sattha leva une armée fluviale et s’en approcha. 

Ayant appris que l’armée laotienne s’était arrêtée dans le braek pour s’abriter du vent, il chargea Brah Deba Vara Jun Huot de conduire une armée de 5000 hommes et de remonter pour attaquer l’armée laotienne par une rive. 

Le prince (Brah Sattha) conduisit une armée par voie fluviale et se tint prêt à attaquer à l’embouchure du braek et à leur barrer la route, empêchant les laotiens de sortir. 

Il chargea son homme de confiance, Cau Bana Puk, d’emmener une armée de 5000 hommes, de remonter pour combattre sur l’autre rive. 

La nuit, les armées des deux camps passèrent à terre et tirèrent des coups de fusil, chacune de leur côté. L’armée laotienne s’affola et se mit à pagayer vers le large. Les soldats khmèrs bondirent de leurs barques, tailladèrent et mirent à mort beaucoup de laotiens. 

Ceux d’entre ces derniers qui parvinrent à l’embouchure, rencontrèrent l’armée de Brah Sattha. Le prince donna l’ordre aux soldats d’attaquer ensemble par devant et par derrière, de sabrer et de mettre à mort les soldats laotiens en grand nombre. Les cadavres flottèrent sur tout le braek, on avait ramassé des barques de guerre, des armements et beaucoup de prisonniers de guerre laotiens. 

Nota : Une autre version de la bataille est donnée dans la même chronique traduite par M. Khin Sok, elle fait l'objet de la note 666 tiré de la chronique DV t.XX p.10. Dans cette version c'est le roi arrivant dans la province de Kratié qui défait l'armée fluviale en utilisant des radeaux enflammés construit à partir des habitations des riverains. Les radeaux descendirent le Mékong et obligèrent les laotiens à débarquer et où ils furent surpris par les khmèrs et défaits. Elle ne fait pas allusion à Brah Sattha. Est-ce un combat qui s'ajoute à celui de Brah Sattha ou une autre version ?? Dans cette version qui n'évoque pas le braek Prasabva, le roi après la bataille alla dans l'ile de Gok Khsac où il tyrouve un prisonnier laotien qui lui paraissait très beau. Il lui demanda "Qui est ton père ?" Le nommé Cau Riem lui répondit : "Je suis le fils de l'Uppahattha Surivansa". Alors sa Majesté lui fit grâce et ordonna de changer le nom de l'île de Gok Khsac en Cau Riem.

L’Uparaja laotien se sauva, passa à terre et reourna dans son pays en emmenant avec lui quelques soldats. 
Le Braek prit alors le nom de braek pasabva et ce jusqu’à nos jours. Le combat eut à Chlun. (ce lieu est peu probable. Un preak homonyme se situant plus en aval dans la province de Kandal près de Phnom Penh est à privilégier : cf article plus récent de ce blog )

Quand au roi du Laos, il conduisit son armée de terre jusqu’à la province de Kamban Svay. Ses soldats étaient harassés de fatigue car ils avaient marché jour et nuit. Ayant vu arriver l’armée laotienne, une patrouille khmère s’en alla informer sa Majesté la priant de prendre connaissance.


Le roi dit :

« Les laotiens ont deux points faibles : d’une part leur armée a été forcée de marcher jour et nuit sans se reposer, d’autre part ils viennent sur notre terrain ; ils périront à coup sûr. »

Alors sa Majesté chargea l’Ukna Cakri de prendre 5000 hommes et de les dissimuler près de la route et à gauche. L’Ukna Bhinut Vahsa fut chargé de conduire 50000 hommes et de les dissimuler à droite. Puis le roi chargea un serviteur d’aller dire à Brah Sri Suriyobarna, son fils, qu’il se tint prêt à attaquer l’ennemi par derrière. L’armée laotienne continua son chemin, sans se tenir sur ses gardes. Alors Brah Sri Suriyobarna conduisit son armée et vint attaquer au sabre l’armée laotienne par derrière. L’armée laotienne s’enfuit, se dispersa dans une déroute complète. Elle rencontra les armées de l’Ukna Cakri et de l’Ukna Bhinut Vansa ; les deux ministres à la tête de leur armée attaquèrent au sabre à gauche et à droite. L’armée du roi combattit de front, se joignant aux autres ; tous frappèrent pêle-mêle. Un très grand nombre de soldats laotiens furent tués. Les cadavres emplirent la forêt, quelques soldats, en déroute, s’enfuirent n’importe où.
 



Le roi du Laos monta sur son éléphant,sa noble monture, avec 5000 soldats. Il combattit pour trouver une issue et retourner dans son pays. L’armée khmère avat capturé plus de 10000 prisonniers de guerre laotiens, et beaucoup d’éléphants, de chevaux et d’armes. Sa majesté ordonna à l’Ukna Cakri de conduire 2500 soldats à la poursuite du roi du Laos ; n’ayant pu l’atteindre ils revinrent.


Sa Majesté récompensa les chefs d’armée suivant les services rendus. Quant à ses deux fils, il daigna leur accorder de se faire porter sur des chaises à porteurs précédés par 8 soldats tenant un fouet à la main. Sa Majesté nomma le Luon Bhakti Anjit Sri, Ukha Sraen Khan Hva lequel s’occuperait des prisonniers de guerre laotiens de la province de Paray. Puis le roi retourna dans sa ville.