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dimanche 3 novembre 2019

1885 - L'insurrection partie 12 : Ramener le calme, des soumissions sans effet


Des missions, dont il fit partie, furent organisées pour parcourir les provinces troublées dans le but d'amener la soumission de ceux qui s'étaient armés.
De Benghi à Takéo puis Vat ponlu et Phnom Penh : échec pour ramener le calme
Dans le pays de Trang, au Sud de Phnom-Penh, des chefs rebelles s'étaient retranchés dans une forêt près de Takéo, et tenaient en échec le petit poste militaire établi dans ce centre, principal marché de la région.
L'envoi d’une mission de pacification y ayant été décidé, le second roi du Cambodge chargé de la négociation, se rendit à Takèo escorté par une compagnie d'infanterie de marine; M. Klobukowski, chef du cabinet du gouverneur de la Cochinchine, qu'accompagnait M. Pavie, vint l'y rejoindre.
La majorité de la population était cambodgienne mais beaucoup de Chinois et d'Annamites s'y mêlaient. Quoique les agglomérations fussent nombreuses, Takèo à L'extrémité d'un affluent du Stung Slakou, avait seul de l'importance, aussi on avait jugé utile d'y installer un petit poste militaire, mais, malgré sa protection, les menaces des rebelles avaient fait abandonner le village par ses habitants.
La mission n'obtint pas le résultat cherché. Après l’échec des négociations, un itinéraire pour ramener la mission à Pnom-Penh les fit parcourir, dans le but d’y maintenir tout au moins le calme, la région entre Takèo et un point à I’Ouest nommé Vat-Ponlu.
Sur la rive gauche du Mékhong, de Banam à Baphnom puis Prey Veng : nouvel échec
Banam, centre commercial important, sur la branche du Mékhong nommée fleuve antérieur, au confluent du dernier des cours d'eau qui, depuis Chhlong, unissent dans le Cambodge, le Tonlé-Tauch au fleuve, était le chef-lieu de la province dans laquelle, à Prey Veng, les troubles avaient éclaté de la manière la plus grave. Il y avait quelques semaines déjà que le pays était désorganisé, que la population était en fuite, et que des bandes tenaient la campagne lorsque la mission, dirigée par M. Fourès, représentant du protectorat accompagné de M. Pavie, se mit en route pour tenter d’y rétablir la tranquillité. Il ne fut possible d'entrer en relations ni avec les bandes ni avec les habitants qui s'enfuyaient dès qu'on approchait. Devant cette attitude et pour ne pas aggraver la situation, M. Fourès ramena sa colonne à Banam après neuf jours d'absence. Quoique à celte époque de l'année la sécheresse soit très avancée, l'inondation a encore sa trace sur le terrain jusqu'aux approches des collines. L'étang de Khsach Sa, en particulier, y créait un obstacle difficile à franchir. Une passerelle provisoire en bambous y avait été établie à l'occasion de leur passage.

La province était très habitée surtout au bord des cours d'eau, autour des hauteurs, et dans l'Ouest. D'épaisses forêts joignaient le plateau de Péan-Chang aux collines de Baphnom. Une immense plaine était cultivée en rizières dans sa partie la moins basse : le reste était inculte à cause des proportions qu’y avait l'inondation, et est couvert de hautes herbes où de véritables troupeaux de cerfs, daims, chevreuils, etc., trouvent asile. La population est cambodgienne: un grand nombre de Chinois et d'Annamites, la plupart commerçants, s'y mêlent, installés surtout à Prey Veng et sur le canal qui aboutit à Banam.
Prey Veng, marché important, avait été détruit. De même, Ia plupart des villages où ils passaient, n'étaient plus que des cendres, cet état de désolation, joint à l'absence de toute la population, fit, de notre infructueuse tentative d'apaisement, la plus pénible des marches.
De Pum-Sé à Kompong_Kiam : autre échec
Celle course, dans la partie sud de la province de Tbaung Khmoum, où M. Pavie accompagnait une colonne, conduite par le résident local, organisée dans le même but que les précédentes, n'eut comme elles, d'autre résultat que le levé de l'itinéraire qui complétait l'étude topographique de M. Pavie, faite lors de la construction du télégraphe. Ce dernier trajet, n'avait pas montré le pays sous un aspect différent de celui que les précédentes marches, dans le bassin du Vaïco oriental. 
C'était la même belle plaine de rizières parsemée de villages à laquelle succédait la forêt épaisse garnissant les hauteurs, puis, en entrant dans le voisinage du Mékhong, des terres basses couvertes de bambous, soumises fortement à l'inondation et inhabitées.

De Svai Romiet à Prey Veng : Première soumission
Ce dernier voyage, effectué avec M. Klobukowski et le second-roi, dans les mêmes conditions que celui de Takèo a Phnom-Penh, reliait l'itinéraire aboutissant à Péam-Pkai-moreck à celui allant de Banam à Prey Veng.
La grosse affaire en quittant le Mékhong pour les terres de l'Est, avait été de chercher l'endroit où passer son bras, le Tonlé-Tauch dont les bords sont généralement à pic, car leur convoi était nombreux en éléphants. La profondeur ou la largeur du cours d'eau importait peu à ces animaux qui venaient de traverser le Mékhong devant Phnom-Penh, mais il leur fallait, pour y entrer comme pour en sortir, des berges en pente douce. La rivière fut lentement franchie à Misapréachan, et l’on se trouva en trois jours, après avoir parcouru un pays fertile et habité, dans les immenses plaines de Prey Veng, terres basses à l'extrême qu'en temps d'inondation une petite chaloupe à vapeur pourrait parcourir très à l'aise, et où les villages était partout où le sol un peu relevé permettait d’habiter.
Les temples bouddhistes, quand ils n'avaient pas été détruits, leur servaient de logement au cours des marches, car la saison pluvieuse avançait et il devenait difficile de camper dans les champs. A Prey Veng où leur séjour devait se prolonger, des installations en paillotes avaient été construites pour la colonne qui outre la compagnie d'infanterie de marine escortant le second roi, comptait plusieurs centaines de Cambodgiens.
Heureusement, le but, cette fois, put être atteint, les chefs rebelles de la rive gauche du fleuve firent tous leur soumission. Ce fut une satisfaction d'autant plus grande pour M. Pavie d'y avoir participé, après tant d'échecs, que cette marche devait être sa dernière au Cambodge.
L’entrevue avait eu lieu dans la forêt de Samrong-Preah-Chi, près de Kompong-Pring et 6000 hommes et 22 chefs de rebelles avaient fait leur soumission sous simple promesse de grâce.