
Ainsi
à Prey Veng, sur la rive gauche du Mékhong, un chef
d'arrondissement se considérant comme molesté par les agents
annamites du résident français, l'attaqua avec ses gens la nuit
lorsqu'il venait pour l'arrêter, tua quatorze de ses miliciens
annamites, le réduisit à s'échapper presque seul et se retira
ensuite dans les bois. Une colonne militaire arriva sur les lieux, se
livra à des représailles, détruisit, des temples et des villages:
la population s'enfuit. Elle devait rester plusieurs mois errante
dans la plus grande détresse.
Alors
d'autres chefs qui n'avaient pas de prétexte personnel de
mécontentement se levèrent isolément dans différentes parties du
pays. Ils laissaient entendre que de hautes personnalités
cambodgiennes les avaient mis debout ou les encourageaient. On savait
par ailleurs que les fonctionnaires, restés fidèles aux
français,
étaient l'objet des sarcasmes ou des menaces de vengeance de
personnes de la cour de Phnom-Penh. Les troubles prirent un caractère
grave.

L a
nécessité s'étant montrée urgente, d'organiser des milices
locales pour remplacer les Annamites, el le Protectorat n'ayant pas
d'hommes préparés pour ce métier, M. Pavie proposa les chefs et
les ouvriers de son équipe télégraphique. Des instructeurs
français et annamites les préparèrent, puis on nomma les uns
sergents et
les plus intelligents des autres: caporaux. Un
noyau de milice ayant une certaine cohésion se trouvant ainsi formé,
il n'y eut plus qu'à encadrer des volontaires.
M.
Pavie s'attacha à faire prévaloir de toute son énergie les idées
de modération à l'égard de populations qui obéissaient résignées
à leurs chefs, et souvent, ne comprenaient pas que, dans la
répression, on ne leur tînt pas compte de ce qu'elles ne croyaient
pas pouvoir se conduire autrement.